Uronema confervicolum, une algue verte benthique potentiellement allélopathique

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L’allélopathie

L’allélopathie est un processus connu de longue date, en effet, d’après Willis (2007) ce type de processus était déjà observé dans l’antiquité. La définition de l’allélopathie – et le terme en lui-même- remonte aux travaux de Molisch (1937), consacrés aux interactions chimiques entre plantes (Der Einfluss einer Pflanze auf die andere: Allelopathie). Cependant, les limites du concept d’allélopathie restent floues. La définition de l’allélopathie la plus reconnue est celle de Rice « any direct or indirect harmful or beneficial effect by one plant (including microorganisms) on another through the release of chemicals that escape into the environment » [tout effet direct ou indirect, positif ou négatif, d’une plante (microorganismes inclus) sur une autre par la production de composés chimiques libérés dans l’environnement] (Rice, 1984). Il est généralement accepté que l’allélopathie désigne aussi des interactions chimiques entre invertébrés sessiles et entre bactéries. Certains auteurs étendent ce concept d’allélopathie : par exemple Fujii et Hiradate (2007) définissent l’allélopathie comme « an action of natural bioactive chemicals produced by plant to other life », d’autres incluent les interactions de type proie-prédateur (Rizvi and Rizvi, 1992). A l’opposé, d’autres auteurs conservent la limite de l’allélopathie comme interaction entre compétiteurs (Gross, 2003). La quasi-totalité des interactions allélopathiques décrites dans la littérature concernent des cas d’inhibition, bien que la différence entre un effet positif et négatif soit souvent une question de concentration (Belz et al., 2007).
D’un point de vue écologique, l’allélopathie est définie comme une forme de compétition par interférence, c’est-à-dire une limitation de la capacité des compétiteurs à accéder aux ressources, par opposition à la compétition par exploitation, c’est-à-dire la déplétion des ressources par leur exploitation directe (Vance, 1984).
Plusieurs types d’allélopathie peuvent être distingués (Sinkkonen, 2006 ; figure 1). En effet, des composés produits par un organisme peuvent inhiber d’autres organismes sans que cela soit la fonction de la production de ces composés (allélopathie ‘non-intentionnelle’). Par exemple les composés phénoliques de feuilles de divers arbres peuvent inhiber des micro-algues aquatiques (Bährs et al., 2012; Tsuda et al., 2005). Cette inhibition n’apporte aucun bénéfice à l’organisme émetteur. La production de ces composés inhibiteurs n’a pas été sélectionnée durant l’évolution de l’espèce émettrice pour sa fonction allélopathique contre les microalgues. La fonction la plus probable de ces composés est certainement la défense contre l’herbivorie ou une activité allélopathique contre d’autres plantes terrestres. D’autre part, un composé allélopathique peut avoir d’autres fonctions en plus de sa fonction d’allélopathie (allélopathie parallèle), e.g. la défense contre l’herbivorie et allélopathie des aldéhydes polyinsaturés produits par les diatomées (Jüttner, 2001; Leflaive and Ten-Hage, 2009). Dans ce cas, on peut supposer que les deux fonctions apportent un bénéfice à l’organisme émetteur et donc participent au maintien de la fonction allélopathique. Des composés impliqués dans le métabolisme primaire peuvent avoir aussi une fonction allélopathique (Pohnert, 2012 et chapitres 2 et 3). Finalement, lorsque le seul rôle connu des composés est une fonction allélopathique, on parle d’allélopathie ‘primaire’ (Sinkkonen, 2006). Il est souvent difficile de déterminer la fonction principale de composés allélopathiques, par exemple de nombreux composés cyanobactériens ont été identifiés, dans un premier temps, pour leur toxicité mais exhibent également une activité allélopathique. Déterminer si la fonction de ces composés est l’allélopathie ou la défense reste complexe (Bajpai et al., 2013; Brutemark and Engström-Öst, 2013; Holland and Kinnear, 2013; Pinheiro et al., 2013; Valdor and Aboal, 2007).
Tous les composés produits par un organisme et ayant une activité inhibitrice ne sont pas des composés allélopathiques. Plusieurs critères ont été établis pour démontrer qu’un composé chimique est un composé allélopathique (Sinkkonen, 2006; Willis, 1985) :
– l’organisme supposé émetteur affecte l’organisme cible (l’inhibition observée ne doit pas pouvoir être causée par d’autres facteurs).
– le composé allélopathique (ou un précurseur) doit être, activement ou non, libéré dans l’environnement.
– la quantité de composé qui atteint la cible doit être suffisamment importante pour causer l’effet observé.
En règle générale, les tests visant à mettre en évidence une interaction allélopathique correspondent à un compromis entre la réalité biologique et l’exclusion de la compétition par exploitation (figure 3 ; Gross et al., 2007). Dans certains cas, un effet particulièrement fort ou ne pouvant pas être confondu avec un effet lié à la déplétion des nutriments permet d’établir le caractère allélopathique d’un organisme (e.g. Vanelslander et al., 2012). Cependant, il est rare de pouvoir déterminer avec certitude la réalité de l’interaction allélopathique, mais l’utilisation de multiples expérimentations différentes peut permettre de réduire très fortement le doute.
Pour une étude plus approfondie de l’allélopathie, il est souvent nécessaire d’identifier les composés impliqués. L’identification des composés allélopathiques repose sur deux méthodes principales: Le fractionnement guidé par bioessais (bioassay guided fractionation ; chapitre II) et l’utilisation du profilage métabolomique (Prince and Pohnert, 2010 ; chapitre III.2). Ces méthodes permettent l’identification de composés bioactifs. Pour établir la nature allélopathique des composés identifiés, il faut respecter les critères cités précédemment. Il est possible de déterminer l’existence d’interactions allélopathiques sans passer par l’identification des composés impliqués. La méthode qui pourrait être la plus fiable pour refleter les conditions normales de l’interaction entre les organismes tout en excluant un effet lié aux nutriments serait d’étudier l’effet de la densité de l’organisme cible sur ça sensibilité à l’organisme émetteur (Weidenhamer, 2006). Cette méthode a fait ces preuves avec des plantes terrestres (Weidenhamer, 2006), mais n’a jamais été testée avec des microorganismes aquatiques.
Effet de l’allélopathie sur le fonctionnement des écosystèmes : Pourquoi étudier l’allélopathie ?
Une grande partie des études consacrées à l’allélopathie s’attache plus à la recherche de nouveaux herbicides bio-sourcés et à la sélection de plantes d’intérêt agronomique (par leur activité allélopathique) qu’à l’étude de l’allélopathie dans un contexte naturel et à la compréhension de son rôle dans le fonctionnement des écosystèmes. Pourtant de nombreux résultats tendent à montrer une grande importance de l’allélopathie dans la structuration des communautés et le fonctionnement des écosystèmes.
La pression de sélection exercée par l’exposition aux composés allélopathiques mène à l’émergence de souches (ou variétés) résistantes à ces composés allélopathiques. Le potentiel allélopathique peut donc ne pas être visible à un moment donné, mais peut être révélé lorsque l’organisme est déplacé vers une communauté composé d’organismes « naïfs » vis-à-vis des composés allélopathiques produits. Ainsi, l’allélopathie est impliquée dans un grand nombre de cas d’invasion biologique par des espèces exotiques (« novel weapon hypothesis » ; Callaway and Ridenour, 2004).
En plus de son implication dans les invasions biologiques, l’allélopathie aurait d’autres impacts importants sur les écosystèmes. En effet, dans des lacs peu profonds, la production de composés allélopathiques par les macrophytes et le biofilm phototrophe favoriserait le maintien d’une eau peu turbide, due à une faible quantité de phytoplancton (Hilt and Gross, 2008; Wu et al., 2014). Dans les milieux aquatiques en général, l’allélopathie participerait au maintient des efflorescences algales (blooms). Bien que la production de composés allélopathiques ne permette pas d’expliquer la formation de ces blooms algaux (Jonsson et al., 2009), elle serait en mesure de les prolonger en empêchant d’autres espèces algales de se développer. Cependant, l’allélopathie est très probablement impliquée dans les successions écologiques. En effet, Keating (1977) a montré que les cyanobactéries formant des efflorescences algales successives dans des lacs eutrophisés étaient systématiquement inhibées par les composés allélopathiques produits par leurs ‘successeurs’. De même, les cyanobactéries succédant à des diatomées produisaient des composés allélopathiques inhibant ces diatomées (Keating, 1978).
A l’inverse de ces cas où l’allélopathie a tendance à renforcer la dominance d’une espèce, l’allélopathie, dans certaines conditions, peut promouvoir la coexistence de différentes espèces par la création de réseaux de compétition circulaire (« circular competitive networks », on parle aussi de relation non-hiérarchique ou intransitive). Le principe de ces réseaux est qu’au lieu d’une relation hiérarchique classique (espèce A > espèce B > espèce C et A > C dans un environnement donné) la relation est d’ordre non-hiérarchique (A > B, B > C, C > A ; à la manière du jeu « pierre-feuille-ciseaux ») (Czárán et al., 2002).
Ce type de relation peut apparaître du fait de la production de composés allélopathiques. L’organisme produisant des composés allélopathiques (A) sera dominant face à un organisme sensible (S) inhibé par les composés allélopathiques (donc A>S). A sera dominé par un organisme résistant (R), ce dernier n’ayant pas à assumer le coût de production des composés allélopathiques (donc R>A). Cependant, si l’on conçoit que la protection contre les composés allélopathiques a
également un coût en terme de limitation de croissance, alors S, qui n’a pas à assumer ce coût, aura une croissance plus forte que R (en l’absence de A) donc S > R (Czárán et al., 2002 figure 4).
Figure 4 : Représentation schématique de la dynamique d’une communauté composée d’une espèce produisant des composés allélopathiques, d’une espèce résistante et d’une espèce sensible. Les valeurs sur les axes représentent l’abondance relative de chaque espèce. Les flèches représentent les trajectoires des communautées. D’après Czárán et al., (2002).
De tels systèmes ont été mis en évidence chez des animaux marins sessiles (bryozoaires, spongiaires et ascidies) (Jackson and Buss, 1975) et ont pu être créés artificiellement avec un modèle bactérien (Kerr et al., 2002). Par contre, aucun cas de compétition non-hiérarchique n’a jamais été décrit chez les plantes ou les micro-algues (Wilson, 2011).

Les biofilms phototrophes

Dans les milieux aquatiques, les biofilms phototrophes sont des assemblages de microorganismes phototrophes et hétérotrophes inclus dans une matrice extracellulaire et se développant à l’interface entre la colonne d’eau et un support. Les biofilms phototrophes se développent généralement sur toutes les surfaces immergées exposées à la lumière comme, entre autres, les rochers, sédiments et plantes aquatiques (Poulíčková et al., 2008; Stevenson, 1996 ; figure 5) D’après Poulíčková et al. (2008).
Le rôle fondamental du biofilm phototrophe dans de nombreux écosystèmes aquatiques rend la compréhension de son fonctionnement particulièrement importante. Le biofilm phototrophe peut représenter la majeure partie de la production primaire de l’écosystème dans la zone littorale des lacs (Liboriussen and Jeppesen, 2003; Vadeboncoeur et al., 2002) et dans les rivières dans lesquelles le courant est trop important pour permettre le développement du phytoplancton (Vannote et al., 1980). En dépit de son importance pour le fonctionnement et le suivi de milieux aquatiques(Lowe and Pan 1996), de sa diversité et sa différence marquée avec le système planctonique, le biofilm phototrophe a reçu relativement peu d’attention (Vadeboncoeur et al., 2002).
Même dans les milieux aquatiques dépendant principalement des apports de carbone allochtones, tels que les ruisseaux forestiers, le biofilm phototrophe joue un rôle important. En effet, même si la production primaire des biofilms phototrophes ne contribue que faiblement à l’apport de carbone organique dans ces milieux, ils sont une source importante d’acides gras essentiels pour les organismes détritivores (Danger et al., 2013). Le biofilm contribue de manière importante aux processus hydrologiques et biogéochimiques en augmentant le stockage transitoire de l’eau, en captant les particules organiques en suspension et les polluants (par exemple les éléments traces métalliques) et en limitant la libération de nutriments à partir des sédiments (Battin et al., 2003; Coutaud et al., 2014; Poulíčková et al., 2008). De plus, les biofilms phototrophes sont le siège d’une importante biodiversité. Cette biodiversité est particulièrement remarquable chez les diatomées. McGregor et al. (2006) a identifié jusqu’à 73 espèces de diatomées sur un site, la richesse spécifique des diatomées d’un biofilm dépasse fréquemment les 20 espèces (Biggs and Smith, 2002; Jyrkänkallio-Mikkola et al., 2016). La diversité est aussi d’ordre génétique, par exemple, différents génotypes de Phormidium sp. ont pu être isolés sur 1cm² de biofilm (Wood et al., 2012). Leur forte diversité (et le fait qu’ils soient fixés) fait des biofilms des indicateurs très utilisés pour l’évaluation de la qualité écologique des cours d’eau (Lowe and Pan 1996). Cela renforce l’intérêt de comprendre les mécanismes à l’origine de cette diversité. Comprendre les mécanismes permettant la coexistence de nombreuses espèces est une question centrale en écologie. Dans le cas des organismes phototrophes benthiques, la compétition est très forte pour une poignée de ressources différentes (lumière, azote, phosphore, CO2 dissous, silice pour les diatomées, vitamines). Les modèles classiques, ne peuvent expliquer cette forte diversité (McCormick, 1996) (cf « paradox of the plankton », Hutchinson, 1961). Les fluctuations des conditions environnementales contribuent à expliquer cette diversité (McCormick, 1996), mais d’autres facteurs pourraient jouer un rôle important.
Il est primordial de prendre en compte le fait que le biofilm ne correspond pas seulement à un ensemble d’organismes posés les uns à côté des autres sur un support, mais que le développement en biofilm a des conséquences importantes. La simple diminution de la distance entre les organismes renforce les interactions et notamment la compétition pour l’espace. Cette organisation en biofilm induit également des gradients de ressources : la lumière diminue très rapidement entre la surface du biofilm et le support, le gradient de nutriments dépend de la nature du support et de l’épaisseur du biofilm (McCormick, 1996). Ces différents gradients physicochimiques transforment le biofilm en une communauté hautement structurée (Stoodley et al., 2002) que l’on peut considérer comme des « paysages microbiens » caractérisés par une forte hétérogénéité spatiale (Battin et al., 2007). Il a  proposé un modèle d’organisation du biofilm (basé sur l’étude de biofilms bactériens) « en champignons » (Costerton et al., 1995), alimenté par des « canaux » permettant le déplacement de l’eau et de substances dissoutes au sein du biofilm (De Beer et al., 1994, 1996). Dans les biofilms matures, la reminéralisation par les hétérotrophes de la matière organique produite par les phototrophes permet un cycle des nutriments très rapide et donc une forte production primaire.
Le biofilm n’est pas seulement composé des microorganismes, bien au contraire, plus de 90% de la masse sèche du biofilm peut être constituée des substances polymériques extracellulaires (EPS). Les EPS forment la matrice du biofilm, ils sont constitués principalement de polysaccharides, de protéines et d’acides nucléïques produits par les organismes du biofilm (Flemming and Wingender, 2010). Cette matrice a de nombreuses fonctions (adhésion du biofilm au substrat, protection contre la dessiccation) mais surtout elle apporte de la cohésion. En effet, c’est la matrice d’EPS qui permet la structuration tridimensionnelle du biofilm et donc la création de micro-habitats très différents. La présence de cette multitude d’habitats pourrait expliquer en partie la forte biodiversité des biofilms. La cohésion du biofilm a aussi comme conséquence de stabiliser les interactions, créant des consortiums stables d’organismes pouvant ainsi coopérer (Flemming, 2009).
Malgré cette stabilisation des interactions par les EPS, les biofilms sont des systèmes dynamiques caractérisés par des cycles de phase d’accrétion (accumulation de biomasse) suivis par des phases d’érosion (détachement du biofilm) (Biggs, 1996). Le détachement du biofilm donne lieu de nouveau à un processus de colonisation, maintenant la communauté en perpétuelle évolution. Un exemple de conséquences concrètes de l’organisation en biofilm est illustré par le fait qu’une même souche de diatomée est plus résistante aux herbicides lorsqu’elle se développe en biofilm que lorsqu’elle est cultivée sous forme planctonique (Larras et al., 2013). Ces avantages de l’organisation en biofilm, en font, d’après Flemming et Wingender (2010), “the most successful forms of life on earth”.
Ainsi il est convenu que les organismes organisés en biofilm interagissent beaucoup plus fortement entre eux qu’avec ceux de la colonne d’eau. Le biofilm est donc à considérer comme un microenvironnement séparé de la colonne d’eau bien qu’interagissant fortement avec elle.

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L’allélopathie dans les biofilms

Il existe deux principaux obstacles limitant l’efficacité de la libération de composés allélopathiques et donc l’existence d’organismes aux propriétés allélopathiques dans les milieux aquatiques planctoniques (Jonsson et al., 2009; Lewis, 1986). Tout d’abord, les distances entre cellules restent toujours relativement importantes (plusieurs fois le diamètre d’une cellule). De cette distance importante résulte une forte dilution des composés lorsqu’ils atteignent une cellule cible. Le coût métabolique de l’allélopathie est donc très fort, à l’exception des blooms où la densité algale devient très importante (Jonsson et al., 2009). De plus, pour les organismes planctoniques, les bénéfices de la production par une cellule de composés allélopathiques seront partagés par tous les organismes non affectés par ces composés et situé à proximité (de la même espèce ou non). Le processus de sélection naturelle favorisera le développement d’individus produisant peu ou pas de composés allélopathiques au sein de la population de micro-algues planctoniques allélopathiques (Lewis, 1986). Le développement sous forme de biofilm réduit l’effet de ces deux obstacles. En effet, les particularités du mode de vie benthique par rapport au planctonique sont en mesure d’impacter fortement les interactions chimiques, et, étant donné l’intense compétition dans les biofilms, les interactions allélopathiques en particulier. La simple réduction de la distance physique entre les cellules facilite les interactions chimiques car les organismes se retrouvent exposés à de plus fortes concentrations de composés allélopathiques. Du fait de cette plus forte exposition, les micro-algues benthiques sont en général plus résistantes aux composés allélopathiques. D’autre part, la plus grande structuration des communautés benthiques modifie l’influence des interactions allélopathiques. En effet, Kerr et al. (2002) ont mis en évidence que l’allélopathie permettait une coexistence de différentes espèces uniquement lorsque les organismes (en l’occurrence des bactéries) étaient organisés en biofilms. D’après Durrett et Levin (1997) les espèces produisant des composés allélopathiques ne peuvent avoir évolué que dans des milieux spatialement structurés, tels que les biofilms. L’article de synthèse qui suit est consacré aux interactions allélopathiques impliquant des microorganismes phototrophes benthiques. Il s’agit de la première synthèse consacrée aux interactions allélopathiques dans les biofilms phototrophes depuis plus de 15 ans (Juttner, 1999). Cette synthèse rassemble les informations et réflexions supportant l’hypothèse d’une grande importance de l’allélopathie dans les biofilms. Dans cet article, les organismes marins et dulçaquicoles sont tous deux considérés car les processus impliqués sont globalement similaires. La grande diversité des espèces parmi les trois groupes majeurs de microorganismes phototrophes benthiques (i.e. cyanobactéries, diatomées, algues vertes) et la diversité de nature chimique des composés allélopathiques impliqués confirment que l’allélopathie est commune dans les biofilms. La diversité des composés allélopathiques impliqués pourrait témoigner de la coévolution des espèces allélopathiques et de leurs cibles. Malgré un faible nombre d’études, plusieurs résultats montrent un impact sur les communautés de composés allélopathiques de micro-algues benthiques (Leão et al., 2012; Scholz and Liebezeit, 2012). La dernière partie de cet article explique comment l’importance de l’allélopathie dans les biofilms peut avoir été sous-estimée du fait des méthodes utilisées non-adaptées à l’étude des interactions allélopathiques dans ces systèmes. En effet, la diffusion des composés allélopathiques ayant principalement lieu par diffusion au sein de la matrice de substances extracellulaires et par les canaux du biofilm, l’étude de ces interactions dans des conditions réalistes est très complexe.

Table of contents :

I. Introduction générale
I.1 L’allélopathie
I. 2 Les biofilms phototrophes
I.3 L’allélopathie dans les biofilms Allelopathic interactions involving benthic phototrophic microorganisms
II. Uronema confervicolum, une algue verte benthique potentiellement allélopathique
II.1 Présentation du modèle – les algues vertes filamenteuses.
II.2 Activité allélopathique d’Uronema confervicolum : implication d’acides gras polyinsaturés.
Impairement of benthic diatom ahesion and photosynthetic activity by allelopathic compounds from a green alga: involvement of free fatty acids?
III. Uronema confervicolum : composés allélopathiques et régulation de leur production
III.1 Régulation de la production d’acides gras polyinsaturés allélopathiques.
Regulation of fatty acids production and release in benthic algae: could parallel allelopathy be explained with plant defence theories?
III.2 Production de composés allélopathiques anti-adhésion.
Production of anti-adhesion allelopathic compounds by a filamentous green alga
IV. Effets de composés allélopathiques produits par Uronema confervicolum sur les micro-algues benthiques
Diatom metabolomic and transcriptomic responses to adhesion inhibition by allelopathic compounds.
V. Discussion générale et perspectives
V.1. Synthèse des résultats obtenus.
V.2. Diversité des interactions allélopathiques dans un biofilm phototrophe.
V.3. Transposition au milieu naturel
V.4. Impact fonctionnel et structurel sur les communautés ?
V.5. Autres questions liées à l’allélopathie dans les biofilms.
Conclusion

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